LE MUSC
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Le musc est une matière première animale entrant dans la composition des parfums. Il est extrait des glandes abdominales des cerfs porte-musc d'Asie centrale. D'autres espèces animales et végétales peuvent produire une substance qualifiée de musc, notamment les Viverridés, comme les civettes, le rat musqué, l'érismature à barbillons, le canard musqué et le bœuf musqué.
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Pour récolter la précieuse matière (environ 30 grammes par chevrotain), il faut souvent tuer la bête (exploitation des chevrotains sauvages). L'odeur du musc pur est si forte qu'autrefois, même les navires les plus rapides répugnaient à assurer son transport en raison de son odeur insupportable. Lorsque le commerce du musc a atteint son apogée au début du xxe siècle, environ 50 000 animaux étaient tués chaque année, pour obtenir approximativement 1 400 kg de musc.
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Heureusement pour les parfumeurs, l'arôme artificiel de musc peut être produit depuis plus d'un siècle, par exemple à partir de la synthèse de muscs nitrés. En 1888, Albert Baur réalisa la synthèse du premier musc nitré, nommé « Musc de Baur » en l’honneur de son inventeur. Il travaillait sur le trinitrotoluène (TNT) et avait préparé un dérivé portant un groupement tert-butyle: le composé obtenu sentait le musc. Il réalisa ensuite diverses variantes de cette molécule qui furent les premiers produits chimiques à l’odeur musquée à être employés en parfumerie. Certains organes d'espèces végétales ont une vague odeur de musc, tels que la racine de certaines angéliques, ou encore les graines d'ambrette (Abelmoschusmoschatus), qui sont cultivées pour cette caractéristique.
(R)-3-méthylcyclopentadecanone
(gauche)
(S)-3-méthylcyclopentadecanone
(droite)
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Le musc provient du chevrotin porte-musc (Moschusmoshiferus) qui est un mammifère ruminant asiatique de la famille des Cervidés. Le chevrotin mâle possède une glande abdominale, située entre le pubis et l’ombilic, qui peut contenir jusqu’à 20 grammes de musc (Guéguen, 2006). L’extraction se fait en période de rut en ponctionnant les poches sécrétrices sur un animal sauvage anesthésié ou sur un animal d’élevage. Le musc est un produit onctueux à l’état frais, devenant grumeleux en se desséchant. De couleur brun noirâtre, il émet une odeur ammoniaquée et pénétrante, liée à une cétone, la muscone (Boullard, 1995). Il est préparé en teintures qui mûrissent pendant de longues années de stockage (Guéguen, 2006).
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C’était une matière première très utilisée durant l’Antiquité grecque et romaine puis à la Renaissance par les parfumeurs. Mais aujourd’hui, la chasse a été interdite pour protéger l’espèce et l’exportation du musc est très réglementée (Guéguen, 2006). Il n’est presque plus utilisé, que sous sa forme de synthèse, le musc Tonkin, à l’odeur douce, ronde et chaude, qui accentue la ténacité et arrondit la composition des parfums (De Feydeau, 2011). L’odeur du musc Tonkin peut être reconstituée par les parfumeurs (notamment à l’aide d’une base appelée “animalis”) et a une odeur extrêmement forte, animale, boisée, très extrême. La synthèse des muscs synthétiques a commencé très tôt et se poursuit toujours dans les laboratoires des grands groupes de la parfumerie comme IFF, Givaudan, ou Firmenich, qui sont les inventeurs et les détenteurs de recettes complexes et tenues secrètes pour recréer des nouveaux muscs qui redoubleront de tenue, de chaleur, de sensualité, et d’unicité (Anonyme, 2012). Les molécules inventées se doivent également de ne pas avoir un impact négatif sur l’environnement ou la santé. Il en existe plusieurs familles.
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Les nitro-muscs, dont fait partie le musc cétone, à l’odeur poudrée, animale et florale, ont été largement utilisés dans la parfumerie du vingtième siècle, et sont aujourd’hui interdits par la législation.